Santiago

29 Aout 2015

Le premier bus de nuit que nous tentons est un échec. Nous commençons par nous endormir tous les trois en attendant le bus, après une ultime tentative infructueuse d’achat de tickets auprès d’une femme peu aimable qui refuse de nous expliquer les raisons de son refus. Réveillés in extremis par les gardiens du site qui me prennent pour une clocharde sans hébergement, nous sautons dans le bus, tickets en main cette fois. Il est 1h du matin, le bus est plein, il fait plus de trente degrés, malgré la compagnie de « luxe » que nous prenons. Impossible de dormir. Peu de temps après, c’est la panne. Arrêtés sur le bas-côté d’une route, sous la pleine lune et au milieu des moustiques, nous regardons impuissants les chauffeurs batailler pour le changement d’une courroie. Rien à faire, ils n’y arrivent pas. Un autre bus vient à la rescousse, et finit par nous dépanner. C’est reparti, pas pour longtemps, nous avons troqué les moustiques contre la pluie cette fois-ci. De retour sur la route, le bus lutte avec ses nombreuses pannes, nous avançons au ralenti, parfois à 20km/h. Avec 4h de retard, nous finissons par arriver à Santiago sous une petite pluie fine. La tempête tropicale Erika est en approche, apportant quelques gouttes salutaires dans cette région où il n’a pas plu depuis 4 mois. Nous sommes ravis d’arriver avec la 1ère pluie, mais nous devrons faire avec en espérant qu’Erika soit moins violente ici qu’en Calédonie en 2005, où l’ile avait été ravagée par un cyclone éponyme. En 2012, c’est le cyclone Sandy qui est passé violemment sur Cuba, faisant de grands dégâts à Santiago. Il suffit de lever la tête pour voir les toits arrachés et toujours pas reconstruits. Notre hôte nous explique à quel point il est compliqué de réparer ici, il faut attendre longtemps avant de pouvoir réunir les matériaux nécessaires.

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Notre hôte, un professeur de physique-mathématique, nous accueille dans sa grande maison coloniale, qui s’ouvre sur un patio fleuri et une arrière-cour remplie de bric-à-brac. Sa maison a été construite au 19ème siècle par son arrière-grand-père dont le portrait orne l’un des murs. La maison abritait autrefois une fabrique de cigares et de rhum, fermée après la Révolution. Il nous montre les vieilles étiquettes qui occupent un autre pan de mur. La maison est ainsi remplie de photos et de souvenirs, chacun ayant son histoire. Il nous raconte qu’en tant que professeur à l’Université de mécanique, il gagne l’équivalent de 35 dollars US par mois, le salaire moyen étant entre 15 et 20 dollars. Avec de tels salaires, il n’y aura bientôt plus de professeurs, ni de gens qualifiés, les jeunes gagnant bien plus en faisant chauffeur de taxi pour les touristes. La vie pour les cubains est très chère, malgré des salaires de misère. Tout est sujet à taxation et il ne faut pas risquer à s’y soustraire. Il nous explique aussi la surveillance constante du gouvernement sur la population, qu’à chaque bloc de maison, il y a une personne qui observe et raconte tout ce qui se passe, peut être parmi ses amis.

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Pour l’approvisionnement en nourriture, les prix sont élevés à Santiago car il n’y a pas de culture autour, pour la pèche, les pécheurs n’ont pas le droit de ramener plus de 5kg de poisson. Autant dire que le marché noir est assez actif malgré les risques qu’il comporte.

Santiago est l’un des bastions de la musique cubaine, aux sonorités africaines. C’est entre autre la ville de Compay Segundo, révélé avec le film et l’album de Buena Vista Club. D’autres grands noms du son cubain sont passés et passent encore par les fameux bars et salles de la ville, dont la Casa de la Trova, la plus réputée d’entre eux.

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Casa de la Trova :
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Un peu de samba africaine dans ce monde de salsa :
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Nous errons dans les ruelles, à la recherche de concerts. Partout, il faut payer pour entrer, la plupart du temps, il n’y a quasiment personne. Pour l’ambiance, en cette fin de samedi après-midi, c’est plutôt raté. Soit nous sommes au mauvais endroit, soit nous sommes à la mauvaise heure. Le soir, les bars sont légèrement plus animés, mais quand nous nous décidons à entrer dans l’un d’eux, prostitués et gigolos se partagent les tables et les danseurs étrangers. La musique est sympa, les danseurs excellents, mais je ne trouve pas cette ambiance vraiment festive.

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Remis de notre soirée toutefois bien arrosée, nous reprenons notre errance dans la vieille ville à la recherche de quelque chose à manger, dans une chaleur étouffante.

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Comme pour la musique, la recherche de nourriture est un échec. Décidément, nous n’avons pas les clés de cette ville.

Le soir, c’est le dernier soir avant la rentrée scolaire, tous les jeunes se retrouvent devant une scène égrenant les chansons à la mode de la nouvelle musique tant appréciée ici : le reggaeton. Le rhum y coule à flot, toujours pur.

Santiago, 2ème ville du pays, 423000 habitants, a joué à maintes reprise un rôle important dans l’histoire cubaine. Aux murs des affiches célébrant les 500 ans de la ville. Ce fut l’une des plus anciennes villes fondées par les colons en Amérique. C’est Diego Colomb le fils de Christophe qui donna l’ordre à Diego Velasquez de conquérir Cuba. Par la suite, Santiago sert de base pour la colonisation du continent américain. La ville fut le foyer des réfugiés français qui fuirent Haiti au moment de la révolte des esclaves au 18ème siècle.

26 juillet 1953, une date à retenir pour Santiago et pour la révolution cubaine, c’est en plein Carnaval que Fidel Castro lance une attaque-suicide sur une caserne, espérant ainsi lancer un grand soulèvement contre le dictateur Batista. Les forces sont disproportionnées, l’attaque mal préparée, arrestations, torture, exécutions s’ensuivent. Fidel ainsi que Raul y est capturé et condamné à 15 ans de prison dont il effectuera les 2 premières sur l’île des pins (la cubaine, pas la Calédonienne). Il sera ensuite gracié en 1955 et s’exilera au Mexique d’où il prépara la Révolution.

Les bateaux sont aussi stylés que les voitures 😉
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Sur les places, les gens se retrouvent pour jouer aux échecs. A Cuba, on vit dehors :
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